Autrefois, les nazis avaient un visage, une idéologie, on savait où les trouver. Aujourd’hui où est l’ennemi ?
A chaque époque ses illusions.
En 1940 culminait en Allemagne l’illusion criminelle que l’anéantissement des juifs et des tziganes permettrait l’avènement d’un homme nouveau.
En 1989 après une longue agonie, mourrait le rêve communiste, et l’idée que chacun pouvait se mettre généreusement au service d’un progrès collectif.
Et depuis l’effondrement du mur de Berlin, l’illusion que le marché veut notre bien à tous et qu’on peut lui faire confiance pour retrouver une société paisible et juste, semble vouloir perdurer…
Mais le doute s’installe. Quel est donc le mal qui gangrène la société ? Qui désigner du doigt, et qui abattre pour retrouver cette sorte de liberté que l’on pensait toucher du doigt à la fin des années 1970 ? Partout dans le monde, on commence à chercher des coupables, des gens qui seraient responsables du chômage, de la dégradation du climat, de la dégradation des mœurs…
Or l’histoire a déjà montré à quel point la recherche de boucs émissaires peut aveugler la raison, et altérer le jugement.
Aussi le plus urgent n’est pas de s’indigner, mais de tenter de comprendre comment, dans une société en paix et libre, où la quasi-totalité des citoyens n’est ni paresseuse, ni animée de mauvaises intentions, le jeu naturel du marché finit par produire du danger social.
Et puisque c’est un travail que les économistes ne font pas, c’est un citoyen ordinaire qui en fait la tentative, avant que cette incompréhension ne vienne fertiliser d’avantage ces idéologies nihilistes ou haineuses, et les extrémismes en tout genre.
Ce petit texte n’a pas d’autre ambition que de proposer un début d’explication. Le lecteur doit se sentir libre d’accepter ou d’en refuser l’idée principale, qui est que l’économie de marché est en train de trouver une limite. Il a été écrit sans arrière-pensée politique, dans le simple but d’exposer cette idée, et avec le souci constant d’en extirper tout dogmatisme.
Il ne proposera aucune solution. Son auteur espère ainsi marquer sa différence avec les propos péremptoires de nombreux économistes, qui n’ont pas l’air de douter de leur capacité à appréhender la totalité de l’activité humaine.
Charge aux bons économistes, s’ils estiment que cela en vaut la peine, de venir en corriger les imperfections, d’en discuter la thèse, de l’améliorer, ou de la contester..